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DE LA PSYCHOLOGIE DU TRAVAIL A LA CRIMINOLOGIE
D’ENTREPRISE Copyright mars 2004 – juin 2009, Sylvianne
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Dans un accès de colère, il tire sur son collègue. Pris à partie par
son contremaître, il lui assène un coup de cutter. Surprise à la sortie de
l'atelier : elle cachait des cassettes sous ses vêtements. Licencié, il se
venge en mettant le feu à l'atelier principal. Perte de motivation à son
travail : elle avoue à sa collègue avoir subit des avances sexuelles de la
part de son chef de service. Cadre avec 15 ans d'ancienneté, il détournait
des informations. Son contrat n'ayant pas été renouvelé; il se venge en
propageant un virus dans le système informatique. Pour ne pas craquer,
certains cadres se droguaient … Ces scènes pourraient
avoir fait la une de nos journaux nationaux. Il n'en n'est rien. Pourtant ces
situations existent et ne sont pas si rares. Leur point commun ? Se situer
dans le cadre de l'entreprise. Que viennent donc faire
des psychologues du travail dans le domaine de la criminologie, domaine
jusqu'alors réservé aux psychiatres et aux psychologues cliniciens ? Eh bien
ces derniers ne sont que rarement présents dans les entreprises. Les
psychologues du travail sont, de par leur positionnement en interne,
confrontés à des situations auxquelles ils ne sont guère préparés. Notre
formation nous axe sur la gestion des ressources humaines. Nos missions ?
Principalement le recrutement, la gestion des carrières, la formation, le
reclassement, l'analyse des conditions de travail. Nos instruments ? Les
tests psychométriques, les entretiens et les mises en situation. Alors quelle
place pour la psychologie criminelle ? Jusqu'à présent, en cas de
vol, de sabotage, d'incendie, de harcèlement, les entreprises ne font appel
qu'à des intervenants extérieurs tels que les agents privés de recherche et
les enquêteurs d'assurance et uniquement dans les buts des démasquer le
coupable ou de vérifier les allégations des prétendues victimes. Des enquêtes
discrètes sont menées, entretiens mais aussi écoute des rumeurs autour de la
machine à café. Mais quelles sont les répercussions pour les victimes et pour
l'entreprise ? Et surtout qu'en est-il des raisons de tels agissements de la
part de ces "employés-déviants" ? Cela personne ne s'en préoccupe
dans les PME/PMI où les services dits "sociaux" sont inexistants. La "criminologie
d'entreprise" est un domaine bien développé aux Etats-Unis et en plein
essor au Canada. En France, toutes les scènes décrites dans mon introduction
n'existent pas. Tout du moins, elles semblent ne pas être réelles. Un tabou
est toujours prévalent : dans les entreprises françaises, il ne se passe rien
de criminel… Aucune statistique n'est là pour le préciser, sauf au sein des
assurances qui se gardent bien de les diffuser. Pourtant tout psychologue en
entreprise vous le confirmera, les vols, les sabotages, les vengeances, les
harcèlements -moral comme physique- sont monnaie courante. Qu'en est-il des
"employés/agresseurs" ? En ce qui concerne les fraudes en interne,
elles sont généralement commises par des employés, hommes ou femmes, en place
depuis fort longtemps et digne de toute confiance. Ils sont à l'aise dans
l'entreprise, connaissent tous les rouages, ont développé de bonnes relations
avec tous les services et principalement avec les services de sécurité
informatique et perçoivent un salaire qui ne permet pas d'imaginer de tels
actes. Dans le cas des homicides, on ne peut que se fonder sur les données
américaines : c'est généralement un homme, d'environ 30 ans et en situation
de grief à l'égard de son entreprise qui est mis en cause. Quant aux vols,
ils restent l'apanage des femmes. Ces personnes pourraient
ne pas être "perdues" pour l'entreprise. Comprendre leurs
motivations, leur personnalité, voilà qui permettrait, bien sûr pour les cas
ne relevant pas de la justice pénale, de les "resocialiser" dans la
culture d'entreprise. Qu'est-ce qui pousse ces personnes à passer à l'acte ?
Souvent un "déclencheur" suffit : reproche considéré comme
injustifié, stress lié à la tâche, licenciement, pression du supérieur
hiérarchique… Quelle personnalité est à l'œuvre sous ces événements ? Quel
drame personnel est sous-tendu ? Quelle fantasmatique s'exprime ici ? A cette
dernière question, les psychologues du travail sont mal équipés pour trouver
une réponse. Si les tests projectifs ne nous sont pas interdits d'accès, les
formations qui permettraient de les utiliser avec efficacité et fiabilité
nous sont limitées voire fermées. Pourtant cette approche de la fantasmatique
serait parfois bien utile en phase de recrutement (prédiction de la
dangerosité) comme en phase post passage à l'acte (évaluation des affects de
l'agresseur et de la crédibilité de la victime). Alors, existe-t-il un
profil psychologique du "déviant" en situation de travail ? La
réponse n'est pas aussi simple. Il est évident que le voleur, le saboteur,
l'incendiaire, le harceleur ne présentent pas les mêmes traits de
personnalité. Connaître ces profils
pourrait permettre de "limiter les dégâts" dans certains domaines
bien précis. Est-il bien raisonnable de recruter une personnalité d'incendiaire
dans une usine de produits chimiques, de placer un profil de harceleur au
milieu de jeunes stagiaires facilement impressionnables ? Bien sûr, le rôle
du psychologue en situation de recrutement n'est pas de décider qui est apte
à travailler ou non ni même d'enquêter sur les antécédents du futur employé,
mais simplement d'orienter chacun dans l'environnement qui lui conviendra le
mieux pour son épanouissement personnel et pour limiter la mise en présence
de déclencheurs du passage à l'acte. Cet aspect -méconnu- du travail du
psychologue ne se limite pas au recrutement, arbitrer les conflits et en
permettre la résolution afin d'éviter tout débordement est une tâche de
longue haleine qui se présente tout au long de la carrière d'un employé. En situation, il est clair
qu'il est difficile de prévenir ces passages à l'acte. Pourtant dans bien des
cas, de nombreux indices (baisse de la performance au travail, idées
bizarres, comportements inhabituels, modification brutale des horaires,
conflits avec les supérieurs hiérarchiques, griefs infondés, arrêts de
travail répétés, sentiment de "victimisation"…) auraient du attirer
l'attention d'un environnement averti. Or, si ces indices sont constatés il
sont purement et simplement ignorés par tous. On conviendra que la
gravité des faits doit être aussi prise en considération. Peut-on prévoir les
risques de récidive, de répétition d'un individu qui a déjà volé, harcelé,
agressé physiquement alors même que ces agissements n'ont jamais donné lieu à
de plaintes judiciaires ? Mais aussi comment empêcher ces actes de répétition
-en traitant le "déviant" ou en traitant l'entreprise (mais
attention à ne pas tomber dans une "culture de l'excuse") ? Et puis
quel suivi pour le "déviant" réintégré ? De même, quel suivi pour
ceux qui l'entourent, car peut-on -doit-on ?- réintégrer et suivre un
"employé-déviant" s'il subit une perte de confiance de la part de
ses collègues et/ou de l'entreprise en sa qualité de structure socialisante ?
Qu'il y ait réintégration ou non, comment gérer le climat d'insécurité généré
et qui peut lui-même devenir déclencheur d'autres passages à l'acte ? Et quel
devenir pour la victime ? Alors, à défaut
d'envisager que tous les psychologues du travail aient une formation
"multicartes", à quand l'entrée de la criminologie dans les cursus
de ressources humaines ? © Sylvianne Spitzer Profilage psychologie
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